5 juin 2020, la Ferme du Bosquet, tout proche de Langon en Gironde. La deuxième partie de la formation en agriculture syntropique est reconduite en distanciel, conditions sanitaires obligent !
La première session avait eu lieu sur 4 jours en février dernier (lire l’article ici), lors de l’implantation d’une parcelle ayant pour objectif principal la production de petits fruits. Cette fois-ci, il s’agit de suivre l’évolution de la plantation et d’ajouter les plants de printemps sur les lignes. Pas de découragement, pas d’annulation, les animateurs s’adaptent, faisant de la technologie une précieuse aide !
La formation a été organisée par l’association les Agron’Hommes et la structure de formation Icosysteme. Le parti avait été pris dès le début, d’utiliser la formation à distance, avec un cours à suivre en ligne pour partir sur des bases communes et solides au début du stage. Le pratique sur le terrain reste primordiale, la rencontre des participants essentielle, les échanges enrichissants. Et c’est probablement grâce au succès de la première session, que les animateurs ont eu à cœur de maintenir la deuxième plantation.
La pluie soudaine en ce printemps précoce n’a pas effrayé les quelques présents sur la ferme : Lucile et Arafat, créateurs de la ferme du Bosquet, Opaline qui joue le rôle de facilitatrice derrière son écran, Steven Werner le formateur (séparé de son acolyte, Felipe Amato, qui n’a pu venir depuis le Portugal), et puis Pablo, Théo et moi en tant qu’étudiants participant au projet d’Ecole d’Agroécologie Voyageuse pour aider à la logistique et à la plantation pendant la journée.

Dès les premières minutes de connexion sur Zoom, certains participants sont tout sourire, d’autres ont vraiment du mal à exprimer leur joie à travers un écran, mais tous sont ravis de « retrouver » les visages de leurs compagnons. Sur la parcelle, Théo suit Steven, son smartphone connecté à Zoom en main, il fait barrière avec son corps pour protéger le micro du vent.

Observer un nid d’arbres à travers Zoom
Les boutures ont sorti les feuilles et il est temps d’apprendre à tailler ; les fèves et féveroles ont droit à une deuxième coupe ; le désherbage doit être minutieux et sélectif, de sorte à ne pas abimer les jeunes pousses d’arbres (pas toujours faciles à reconnaître à leur stade juvénile) et à simplement tailler certaines espèces qui couvrent le sol. Les stagiaires posent leurs questions en direct, Opaline distribue la parole et tout se déroule pour le mieux. Après une matinée « terrain », l’après-midi est consacrée aux questions, toujours avec Zoom.

L’après-midi permet de rappeler les principes et les pratiques de cette agriculture innovante et peu intuitive dans les modèles agricoles actuels. Le suivi de l’avancement de la parcelle évite les fantasmes (« en fait il ne suffit pas juste de planter et ça pousse tout seul !« ) , et donne quelques clefs sur la gestion d’un jeune système agroforestier. Un suivi bienvenu et même nécessaire dans l’optique d’être capable de faire chez soi ses propres plantations. Bien que le présentiel soit toujours préférable, la technologie a permis de maintenir un suivi en direct d’une étape phare de la formation. Et puis, cet évènement inattendu est l’occasion d’une rencontre supplémentaire en chair et en os, puisque le 24 juillet prochain, les stagiaires seront présents sur la ferme du Bosquet pour les plantations de légumes d’automne.
La ferme du Bosquet
Il y a deux ans, Lucile Muller et Arafat Sharipudin s’installent dans la région d’origine de la jeune femme, à Castets-en-Dorthe (33). Des poulets gambadent entre de jeunes arbres plantés sur leur parcours, calmes et curieux de toute nouvelle activité sur leur coin de verdure. Des choux-raves tutoient les patates et la coriandre sous le regard attentif du chat qui accompagne ses paysans.

La ferme du Bosquet propose ses produits bio en AMAP, en vente directe à la ferme ou sur des marchés. Toujours à l’affût de méthodes durables en agricultures, le couple a accueilli la formation en agriculture syntropique. La parcelle plantée en février 2020 est réfléchie pour la production d’arbres fruitiers, avec des cultures maraîchères les premières années.

L’agriculture syntropique, kézako ?
L’agriculture syntropique, ou agroforesterie successionnelle, c’est une agriculture qui se base sur la succession végétale dans le temps et sur l’occupation des strates végétales en fonction des exigences pédoclimatiques des plantes. Lors de l’implantation du système, sont semées ou plantées des espèces diverses, compatibles et choisies en fonction des objectifs de l’agriculteur. Les arbres forestiers, fruitiers, les légumes et l’ensemble des espèces sont réfléchies dans le temps et dans l’espace pour pouvoir croître dans les conditions optimales. Le système est ensuite géré par la taille d’espèces à croissance rapides, permettant de faire entrer de la lumière et d’apporter de la matière organique au sol. Les produits récoltés évoluent dans le temps, en accord avec leur place dans le système à un moment t. C’est Ernst Götsch, chercheur Suisse et agriculteur au Brésil qui a développé l’agriculture syntropique, en se basant sur la compréhension des écosystèmes et sur son expérience personnelle.
L’agriculture Syntropique c’est la récupération du sol par son utilisation. Il s’agit de l’installation de parcelles hautement productives, qui deviennent indépendantes en intrants externes et permettent la formation de sol, la régulation du microclimat et l’amélioration du cycle de l’eau.

La formation à distance a donc été positive et s’est révélée un bon outil d’adaptation. Mais il faut garder à l’esprit que si cette deuxième session à travers les écrans a été un tel succès, c’est probablement grâce à une première rencontre, les bottes aux pieds sur la parcelle, et dans avec comme objectif tant attendu les prochaines retrouvailles: cela permet de calmer une possible frustration !
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L’auteure
Quelles pourraient-être l’agriculture et la société, si elles ne s’étaient pas développées ces dernières années dans un système occidental mondialisé ?

Lucie Maurel est passionnée par les voyages, l’étude des communautés humaines traditionnelles et leur lien avec l’agroécologie. Elle réalise ce projet lors de sa césure d’ingénieur agronome en 2020, soutenue par le projet AgroSys de son école Montpellier SupAgro, et fait partie du projet Les Agron’Hommes.
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