6 œufs, de la farine et des pommes de terre. Est-ce assez pour remercier ces agriculteur.ice.s de leur travail ?

Il est 8 heures sur le marché. Les premier.e.s client.e.s sont là, on sourit, on dit bonjour, on est heureux.se. On montre nos produits, on rend la monnaie et on dit « merci« . Au suivant, bonjour, merci à bientôt. On voit des dizaines de visages, on accepte les critiques s’il y en a.

Quelle consécration d’être agricultrice et agriculteur ! Quelle motivation de prendre soin de ces animaux, de gérer tous les imprévus, de veiller à leur santé, leur nourriture, leur bien-être.  De veiller sur leur production, du ramassage de l’œuf dans le pondoir au chargement de l’animal dans la bétaillère pour l’abattoir. Du comptage d’œufs et de leur calibrage, sans les casser, à la confection des commandes de viande sous-vide, sans l’abîmer. Quelle patience pour planter des pommes de terre et des céréales, les aider à se développer malgré les attaques des adventices, en étant attentif.ve à la santé du sol, de ces millions de microorganismes le composant et de ces couverts végétaux le protégeant. De l’attaque du taupin à la récolte méticuleuse de ces cultures, les trier, les calibrer, les peser, les étiqueter. Quelle motivation de régler son réveil à 5h30, tout charger dans le camion en ordonnant tout, prendre la route pour le marché. Tout décharger, tout présenter, tout préparer. 8 heures sonnent, le marché commence dans ce petit village breton.

Nicolas écrit cet article depuis la ferme…
…de Trévéro, en Bretagne…
…une ferme qui prend soin du Vivant.

Seulement voilà. Aussi bien en tant que client.e que producteur.ice : est-on conscient.e que toutes ces heures, toutes ces émotions, ces inquiétudes, à prendre soin de ce que l’on produit et de son environnement est en train de partir pour sa finalité ? Juste nous nourrir, assouvir le premier besoin vital qu’est d’apporter à son organisme le nécessaire pour survivre, puis nous permettre de passer un moment agréable à se délecter, seul.e ou à plusieurs, avec ce que la Nature nous as offert. Est-on conscient.e de notre acte lorsqu’on achète à manger au marché ? Dit-on merci au/à la producteur.ice pour la monnaie qu’il/elle nous rend ou pour son implication dans cette difficile tâche qu’est de travailler avec et grâce au Vivant ? 6 œufs, de la farine et des pommes de terre. Est-ce assez pour remercier ces agriculteur.ice.s de leur travail ? Comment remercions-nous celles.eux-ci lorsque nous achetons les produits en magasin ?

Comment prendre conscience qu’il n’y a rarement que 35 heures/semaine derrière ce rôti ou cette omelette ? Qu’il n’y a rarement que plus de 1 300€ net/mois derrière ce potage ou ces frites ? Comment prendre conscience de la responsabilité de ces personnes souvent alourdies par un prêt de plusieurs centaines de milliers d’euros ? Et enfin, conscience de la responsabilité du paysan d’être au plus proche de l’environnement, du Vivant ?

Peut-être que notre devoir est d’au moins se rendre compte du travail fourni par ces collaborateur.rice.s du Vivant et peut-être les remercier, autant qu’elles et eux doivent remercier la poule pour son œuf, le cochon pour sa viande et le vivant du sol pour ses pommes de terre. 

Aujourd’hui je me rends compte du contraste incroyable qui existe entre la consécration des paysan.ne.s à produire un aliment, et la vitesse à laquelle cet élément de la Nature s’en va pour atteindre son but si banal mais si complexe : nourrir.

Nicolas, AgroSamouraï

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